Le Deal du moment :
Cartes Pokémon 151 : où trouver le ...
Voir le deal

Dreams shape the world

@ Tatiana M. Netaniev

Tatiana M. Netaniev
Jean Premium
Messages : 1
Date d'inscription : 25/04/2023
#
Mar 25 Avr - 18:29
Dreams shape the world
Eleanor & Tatiana


▬ Novembre  – Zambie, région de Mumbwa ▬

Le levé du soleil perçait les dunes gigantesques à l'horizon. Le spectacle était saisissant. Les ombres se dressaient entre les collines de sable, leurs sommets s'illuminaient de nuances orangées et pas un bruit, si ce n'était la petite brise trop rare qui soulevait les grains légers, ne venait perturber la scène. Le monde offrait ce qu'il portait de plus beau dans cette mer de sablon brûlant. Tatiana y trouvait une noblesse qui la ramenait toujours à sa place ; Elle n'était rien d'autre qu'un être humain vulnérable malgré l'immense pouvoir qui courrait le long de ses veines. Face à l'immensité aride, un faux pas pouvait lui faire rejoindre l'autre monde et le nom des Netaniev n'y pourrait rien.
C'était l'une de ces étranges raisons qui avait fait de Tatiana une passionnée d'archéologie. Sur le terrain, son nom n'était rien d'autre qu'un nom. Il n'était ni un bouclier, ni un passe-droit. Il n'était rien que ça, un nom. Une origine, une racine comme une autre, qui n'avait aucun pouvoir contre la nature hostile et inconnue.

Une tasse de thé chaud à la main, la sorcière contemplait l'immensité. C'était son moment. Les doutes, les contrariétés ou les dernières inquiétudes étaient laissées à la porte de sa tente. Ici, rien d'autre n'existait que ce qu'elle voyait, sentait et Tatiana en avait fait son rituel depuis le début des fouilles. Chaque matin, à six heures, elle s'asseyait sur ce morceau de tronc qui semblait avoir été posé ici par on ne savait quel esprit pour que les voyageurs puissent s'y installer. Le morceau d'arbre abandonné plus petit qu'un banc et terriblement sec était l'anomalie du décor. Personne en savait ce qu'il venait faire ici, perdu dans cet océan de sable.

Le soleil débutait sa course de jour que déjà la chaleur grimpait à vue d'œil. Tatiana remonta le tissu de son cheich sur sa bouche et son nez avant de quitter le tronc d'arbre, sa tasse de thé presque vide en main. S'accorder ce temps de repos et de contemplation lui permettait toujours de débuter sa journée avec l'esprit plus clair. C'était le moment qu'elle choisissait pour céder ses pensées à l'évasion sans se faire retenir par les filets du doute. Ainsi, de retour au cœur de sa tente ensorcelée et donc, aménagée, la sorcière était parfaitement réveillée et l'esprit frais pour reprendre sa quête.

La tasse fut déposée sur une large table ronde en bois jonchée de feuillets noircis d'écrits, de parchemins, de livres aux reliures usées, de compas, de plumes et de crayons, de deux cartes de la région datées des années 1800 et 1900. Au milieu de tout ça, trônait son carnet de recherche ouvert sur ses notes de la veille. L'adrénaline courait sous sa peau légèrement tanée par ses deux dernières semaines passée sous le soleil de Zambie.
Ils avaient enfin retrouvé la piste du disque solaire de la déesse Bastet après en avoir perdu la trace en Egypte. Le campement entier frémissait d'excitation depuis hier. Certainement que Soria n'avait que peu dormi cette nuit, au même titre que Tatiana qui mourrait d'envie de se précipiter à la suite des indices que l'artefact avait semé derrière lui. Son expérience lui avait apprise que foncer tête baissée était souvent synonyme de danger, voire de mort. Mais elle devait admettre qu'après toutes ces années de silence à n'être qu'une anonyme au milieu des ombres nourrissait en elle la même impatience que ses premières années.

Après avoir fait sa toilette à l'aide de son petit lavabo de fortune, la sorcière avait relevés ses longs cheveux blonds en une queue de cheval dont quelques mèches retombaient contre sa nuque ou ses joues. Elle rassembla notes, parchemins et tout le bazar mit la veille en quelque chose de plus ordonné et fit face au tableau en liège où étaient épinglées d'autres cartes, notes etc.
Sa tente n'était pas si ordonnée que pouvait l'être son bureau mais on s'y retrouvait malgré tout facilement. La table pour étalier ses recherches se trouvait le plus éloignée de l'entrée pour éviter aux grains de sable d'en salir les écrits anciens. Un large tapis persan recouvrait une bonne partie du sol jusqu'à son lit de fortune d'une place. Une petite armoire se dressait à son opposée, une malle sagement disposée à ses côtés. Aux côtés de son lit, une petite table de chevet en bois où se dressait une photo animée de Louis.

Son fils lui manquait chaque jours et Tatiana apprenait à ne plus culpabiliser de ne pas penser à sa frimousse aux lunettes rondes lorsque son esprit tout entier était dédier à Bastet et ses deux autre facettes. Il était d'une évidence que son enfant était sa priorité, il n'y avait pas un soir où la sorcière ne l'appelait pas pour lui dire bonne nuit et accorder trente minutes de son temps pour lui raconter une histoire.
Et il n'y avait pas un soir où elle ne pensait pas à son amante de qui elle n'avait ni photo, ni parfum pour se la remémorer. Pour autant, ses sourires, la clarté de ses yeux ou ses fossettes lui revenaient avec autant de précisions que les courbes de son corps lorsqu'elle n'était pas trop épuisée et ne s'endormait pas aussitôt après avoir posée la tête sur l'oreiller.

Une bourrasque fit claquer les pans de sa tente comme pour la rappeler à l'ordre.
Encore une fois, Bastet n'attendait pas.
Sekhmet et Hathor non plus.

"T'es décente ?
- Entre, Soria.
- Question idiote, tu l'es toujours. Quand ne l'es-tu pas serait plus juste."

Soria éclata de son rire franc, Tatiana leva les yeux au ciel.
La bonne humeur et la vivacité de son amie et collègue de travail lui avaient particulièrement manquée et l'amusait plus grandement qu'à l'époque.
La chercheuse aux cheveux bruns et épais rejoignit Tatiana en agitant un rouleau de parchemin dans sa main.

"J'ai l'itinéraire détaillé du jour, le convoi est déjà prêt et les guides locaux nous attendent.
- Bien, souffla Tatiana. Une légère anxiété pinça le creux de son ventre entremêlée d'excitation. Tu as fait relire les hiéroglyphes à Majid ?
- Oui, il est formel sur la traduction. On est sur la bonne voie. Ca n'est plus qu'une question de temps."

Leur égyptologue Majid, originaire d'Egypte, avait passé 30 ans de sa vie le nez dans l'histoire de son pays et toutes les légendes qui le parcouraient. Si l'homme était sûr de ce qu'il disait, alors ni Soria, ni Tatiana ne le contrediraient.  
L'énigme inscrite maladroitement tant par les mots que par l'écriture, se trouvait sous la tête d'une momie. La sépulture du scribe Paneb qui a longtemps été considéré comme un homme lambda et sans histoire, se trouvait à l'ouest du complexe funéraire de Khéops. Soria et Tatiana avaient passées de très nombreuses nuits blanches avant de remontées jusqu'à lui, noyées par le doute qu'un homme si banal pouvait conserver le disque. Et pourtant… Si le scribe n'avait pas l'artefact, il possédait néanmoins l'énigme qui les mettrait sur sa trace. L'équipe de chercheur n'en connaissait pas encore la raison mais il était terriblement curieux que Paneb emmène un aussi grand secret dans sa tombe.

"La Puissante se cache là où le sang coule vers le ciel et où Rê éclaire le regard de Bastet. Prends garde, Homme, tu n'es point le bienvenu. Seule les protégées seront tolérés."

Après la traduction au plus proche de Majid, il leur avait fallu deux mois pour déterminer l'endroit où chercher. Les enquêtes auprès des habitants locaux, des heures et des heures passées entre les bouquins, les milles discussions avec les natifs pour connaitre les légendes contées de famille en famille, l'équipe était parvenue à déterminer une large zone. Puis un lieu plus précis encore.

Ils avaient tout d'abord été induit en erreur par la légende "La vallée des Reines" et avaient enquêté sur la nécropole des épouses royales et de leurs filles sans succès. Puis, ils avaient pris connaissance des grottes portant le même nom plongée en plein cœur du désert en Zambie. Si l'on écoutait les récits, le soleil se levait chaque matin sur la combe de telle sorte qu'elle semblait plongée dans un  bain de sang qui remontait le long des crêtes et des roches, puis vers le ciel. Ca ne durait que quelques minutes, le temps que "Rê", le dieu soleil, n'éclaire pleinement deux larges orifices parallèles ressemblant à des yeux. Des yeux plantés dans une montagne rocheuse qui elle-même ressemblait vaguement à une tête de chat …

Alors, assise à l'avant de la Jeep, Tatiana frémissait à chaque mètres parcourus. Il faisait une chaleur étouffante malgré l'heure matinale. Une pellicule de transpiration perlait à l'orée de ses cheveux et ruisselait le long de sa nuque couverte de son cheich. Elle s'était peu à peu adapter au climat mais le désert ne pardonnait presque personne et surtout pas les petits étrangers qu'ils étaient. Le paysage n'avait rien de changeant. Pendant près d'une heure, le convoi traversa à bon rythme des kilomètres de sables et de dunes brûlantes. Elle fit la discussion au chauffeur natif et l'un des guides au regard translucide et perçant. Tatiana tuait le temps comme elle le pouvait pour faire taire l'impatience.

"Vous avez des enfants, Madame ?
- Un fils oui, Louis.
- C'est joli ça ! Et ça veut dire quoi ? C'est important de savoir. Prenez ma fille : Saïda. On ne savait pas à quel point elle porterait si bien son nom. C'est l'enfant la plus joyeuse que je connaisse. Un véritable soleil."

Le chauffeur, Mawuko, avec le visage rond à la peau olive. Ses cheveux coupés courts étaient aussi noirs que ses épais sourcils en broussaille et ses pupilles. Saïda avait de qui tenir ;  Jarir était un homme joyeux, naturellement souriant.
Tatiana souriait derrière son tissu et Eleanor lui aurait dit qu'il se voyait jusque dans ses yeux.

"Saïda...  c'est très joli. Et vous pensez que nous conditionnons nos enfants selon le prénom qu'il porte ?
- C'est certain. Donc, votre garçon ?
- Je crois me souvenir que Louis veut dire "illustre au combat".
- Alors votre fils sera un formidable guerrier. Pas avec un fusil à la main, mais il saura tenir bon face à ce qu'Allah lui réserve."

La sorcière n'ajouta rien.
Elle n'avait aucun doute que Louis avait sa propre force morale… mais son fils avait également un cœur si sensible pour ce monde. Trop, peut-être.
Non, elle avait tort de penser de cette façon. C'était cette sensibilité qui faisait de lui un être humain pur, gorgé de considération pour l'autre et d'émerveillement pour le monde. Peut-être serait-ce en cela que Louis se montrera "illustre au combat" ; par la force de son optimisme.

"Pourquoi ralentissons-nous ?" demanda Grégory, l'homme au regard translucide.

Tatiana pencha légèrement la tête de côté, hors du véhicule, espérant voir la raison de leur ralentissement puis de leur arrêt. Elle vit la tignasse épaisse de Soria faire de même.
L'une des Jeep de tête avait fait demi-tour et s'arrêtait, voiture après voiture.

"Je suis désolée Mrs, mais il nous faut faire demi-tour. Une tempête de sable se dirige droit sur nous.
- Une tempête ? Rien n'avait été annoncé jusqu'à ce matin.
- Je sais, mais le désert ne répond à aucune autre loi que la sienne Madame. Il arrive qu'elles se déclarent sans prévenir et il serait dangereux de poursuivre."

Une enclume tomba lourdement dans son estomac. La déception était amère et Tatiana ne s'en cacha pas, claquant sa langue contre son palais. Soria était déjà à sa hauteur.

"Fais chier. Est-ce qu'on essaie d'établir un camp ici ?" La brune s'adressa directement à l'annonciateur de mauvaise nouvelle. "C'est possible ça ?
- Nous n'avons pas le matériel pour.
- Rentrons." Tatiana serrait les dents derrière le tissu. Inutile de perdre plus de temps. Ils risquaient de se retrouver coincer en pleine tempête et il n'était pas question de mettre en danger la vie de qui que ce soit.
Soria claqua la portière du plat de la main d'un geste rageur et retourna à son véhicule. La même colère frustrée irradiait les veines de Tatiana.

Ils étaient à une heure de la vallée. A une maigre heure d'une légende insoupçonnée.

"Elle vous met à l'épreuve.
- Pardon ?
- Votre déesse, elle vous met à l'épreuve. Soyez en sûre."

±

Sekhmet testait visiblement leur patience et leur volonté. La tempête avait durée deux jours.
Le bruit interrompu des grains de sable fouettant le tissu de sa tente avait été insupportable. Heureusement pour elle, la magie avait pu lui accorder des heures de silence. Tatiana avait tué le temps en approfondissant ses recherches, en listant toutes les possibilités d'épreuves ou d'obstacles qu'ils pourraient trouver sur leur route. Elle avait écrit une longue lettre à Eleanor de quatre pages ; La russe avait pris son temps pour noircir les parchemins de son écriture soignée, trouvant peu à peu le calme, apaisant sa frustration. L'effet était toujours le même. Ecrire à la styliste lui procurait chaleur et accalmie.

Au bout du troisième jour où la tempête c'était enfin levée, ils avaient tous eu la désagréable surprise de constater que deux de leur Jeep refusaient de démarrer. A l'annonce de deux jours supplémentaires à devoir attendre, Tatiana cru que Soria allait défier les lois de la nature en s'armant d'un  baluchon et de son courage. Evidemment, son amie n'en fit rien mais elle pouvait voir chaque jour son regard s'impatienter.

Quant à Tatiana, elle commençait à doucement tourner en rond et sa magie rouge lui soufflait d'accélérer les choses à sa façon.

Attablée auprès de ses parchemins, la sorcière se refusait à forcer le destin. Les mots de Mawuko lui étaient restés. Son éducation et sa magie étaient bien trop imprégnées de divinité et de légende pour aller stupidement provoquer une entité aussi puissante. Alors elle occuperait cette énième journée à tenter de déchiffrer un ancien parchemin qui conservait presque jalousement tous ses secrets… Tellement concentrés sur les écritures anciennes, Tatiana n'entendit pas l'arrivée en fanfare, ni quelques éclats de rire qui réchauffait ce campement si froid de frustration.

code by bat'phanie
me contacter

permissions de ce forum

Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum